COUR PERMANENTE DE JUSTICE INTERNATIONALE ARRÊTS ORDONNANCES E T AVIS CONSULTATIFS ---- FASCICULE No 74 PHOSPHATES DU MAROC EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES ARRÊT DU 14 JUIN 1938 JUDGMENT OF JUNE 14th 1938 PERMANENT COURT OF INTERNATIONAL JUSTICE JUDGMENTS ORDERS AND ADVISORY OPINIONS FASCICULE No 74 PHOSPHATES IN MOROCCO PRELIMINARY OBJECTIONS LEYDE SOCIÉTÉ D'ÉDITIONS A W SIJTHOFF Il LEYDEN A W SIJTHOFF'S PUBLISHING COMPANY COUR PERMANENTE D E JUSTICE INTERNATIONALE 1938 Le 14 juin Rôle général no 71 ANNÉE JUDICIAIRE 1938 14 juin 1938 PHOSPHATES DU MAROC EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES Déclaration apposée par la France à la disposition facultative relative à l'acceptation comme obligatoire de l a juridiction de l a Cour article 36 paragraphe 2 d u Statut L i m i t a t i o n ratione temporis - Portée des termes « sur tous les digérends q u i s'élèveraient après la ratification de la présente déclaration a u sujet des situations o u des faits postérieurs à cette ratification I - Situation prolongée a u delà de la date critique antériorité des faits q u i ont déterminé cette situation Défaut de juridiction Allégation d ' u n fait illicite international antérieur à l a date critique résultant d'une violation de droits acquis placés sous l a sauvegarde de conventions internationales Allégation d ' u n déni de justice postérieur à cette date Absence d'influence d u déni de justice s u r la consommation d u fait illicite international et sur l a responsabilité q u i e n dérive Défaut de juridiction Présents M GUERRERO Président sir CECIL HURST Vice-Président le comte ROSTWOROWSKI MM FROMAGEOT DE BUSTAMANTE ALTAMIRA ANZILOTTI URRUTIA NEGULESCO Jhr VAN EYSINGA MM CHENG DE VISSCHER juges PERMANENT COURT O F INTERNATIONAL JUSTICE 1938 June 14th General List JUDICIAL YEAR 1938 No 71 June i4th 1938 PHOSPHATES IN MOROCCO PRELIMINARY OBJECTIONS Declaration affixed by France to the optional clause relating to the acceptance of the jurisdiction of the Court Article 36 paragraph 2 of the Statute as compulsory Limitation ratione temporis Import of the words in any disputes which may avise after the ratification of the present declavation with regard to situations or facts subsequent to such ratification -A situation prolongecl beyond the crucial date priority i n date of the acts which led to this situation Lack of jurisdiction -Allegation of a n unlawful international act prior to the crucial date and resulting from a violation of vested rights placed under the protection of international conventions Allegation of a denial of justice subsequent to that date Absence of influence of the denial of justice upon the accomplishment of the unlawful international act and u p o n the responsibility ensuing from zt Lach of jurisdiction JUDGMENT Present M GUERRERO President Sir CECIL HURST Vice-President Count ROSTWOROWSKI MM FROMAGEOT DE BUSTAMANTE ALTAMIRA ANZILOTTI URRUTIA NEGULESCO Jhr VAN EYSINGA MM CHENG DE VISSCHER J d g e s 4 II A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Dans l'affaire des phosphates du Maroc entre le Gouvernement du Royaume d'Italie représenté par M R Montagna comme agent le Gouvernement de la République française représenté par M J Basdevant comme agent et Me Lémonon comme agentadjoint La Cour ainsi composée rend l'arrêt suivant Par requête déposée et enregistrée au Greffe de la Cour le 30 mars 1936 par application de l'article 40 du Statut et de l'article 32 du Règlement de la Cour le Gouvernement italien a introduit devant la Cour contre le Gouvernement français une instance concernant les phosphates du Maroc La requête du Gouvernement italien était rédigée comme suit « Vu les articles 105 112 73 74 de l'Acte général signé à Algésiras le 7 avril 1906 et les articles premier 4 et 7 du Traité Ganco-allemand du 4 novembre 1911 Vu la déclaration en date du 7 novembre 1911 par laquelle le Gouvernement d'Italie donna son adhésion au traité susdit Vu les déclarations d'adhésion de l'Italie et de la France à la Disposition facultative de l'article 36 alinéa 2 du Statut de la Cour permanente de Justice internationale Vu l'article 40 du Statut de la Cour et l'article 35 alinéa 2 du Règlement relatif A l'honneur de vous adresser la requête suivante Attendu que entre le 17 octobre 1918 et le 29 avril 1919 trente-trois permis de recherche de phosphates en périmètres réservés furent délivrés par le Service des Mines du Maroc à la priorité de la demande aux ressortissants français MM Francis Busset et Frier Deruis dans la région Oued Zem -Bir Fenzer Que vingt-huit de ces permis d'abord cédés par les premiers titulaires au ressortissant italien M Costantino Tassara sont actuellement la propriété de la Société italienne Miniere e Fosfati dont le représentant et fondé de pouvoirs est le commandeur Gaspare de Gennaro Musti Que ces permis étaient régis par le règlement minier promulgué par le dahir du 19 janvier 1914 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO I n the case concerning phosphates in Morocco between the Government of the Kingdom of Italy represented by M R Montagna as Agent and the Government of the French Republic represented by M J Basdevant as Agent and Me Lémonon as Assistant Agent The Court composed as above delivers the following judgment By an Application filed with the Registry of the Court on March goth 1936 under Article 40 of the Statute and Article 32 of the Rules of Court the Italian Government has instituted proceedings before the Court against the French Government concerning phosphates in Morocco The Application of the Italian Government was as follows Translation Having regard to Articles 105 112 73 and 74 of the General Act signed at Algeciras on April 7th 1906 and to Articles 1 4 and 7 of the Franco-German Treaty of November 4th 1911 Having regard to the declaration dated November 7th 1911 whereby the Italian Government acceded to the said Treaty Having regard to the declarations of accession made by Italy and France to the Optional Clause of Article 36 paragraph 2 of the Statute of the Permanent Court of International Justice Having regard to Article 40 of the Court's Statute and to Article 35 paragraph 2 of the Rules of Court which relates thereto Has the honour to submit the following application Whereas between October 17th 1918 and April q t h 1919 thirty-three licences to prospect for phosphates in reserved areas in the Oued Zem-Bir Fenzer district were issued by the Department of Mines of Morocco in the order of priority to the French nationals MM Francis Busset and Frier Deruis Whereas twenty-eight of the said licences which had been handed over by the original holders to the Italian national M Costantino Tassara are now the property of the Italian Company Miniere e Fosfati of which Commander Gaspare de Gennaro Musti is the representative and agent Whereas these licences were governed by the Mining Regulations promulgated by the dahir of January g t h 1914 5 12 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Que conformément aux clauses de l'Acte général d'Algésiras du 7 avril 1906 et de l'Accord franco-allemand du 4 novembre 1911 auquel l'Italie a à son temps adhéré ledit règlement devait non seulement respecter le principe général de la liberté économique sans aucune inégalité porte ouverte mais se baser aussi sur le système des concessions « en s'inspirant des légis« lations étrangères existant sur la matière » art 112 de l'Acte d'Algésiras et en définitive de la loi française art 7 de l'Accord franco-allemand Que d'après l'article 51 du règlement les phosphates ne pouvaient être exploités qu'en vertu d'adjudications publiques toute adjudication portant sur le taux d'une redevance spéciale à payer par tonne de produits extraits Qu'il était notamment établi Les explorateurs munis de « permis de recherche en périmètre réservé qui auront découvert « dans leur périmètre des gîtes de phosphates nouveaux et « démontré leur exploitabilité auront droit pendant un délai de « quinze ans à dater de la décision qui leur aura reconnu la « qualité d'inventeurs à un cinquième des redevances spéciales à « la tonne payées par les adjudicataires 1 Que en date du 4 août 1919 la Direction générale des Travaux publics publiait au Bulletin ogiciel du Maroc la note suivante « Des gisements de phosphates d'une étendue considé« rable et d'une teneur exceptionnelle ont été reconnus dans les « régions d'El Boroudj et de l'Oued Zem En conformité de « l'article 51 du dahir du 19 janvier 1914 portant règlement « minier leur exploitation fera l'objet d'une adjudication dont « l'Administration compte fixer très prochainement la date Que ce nonobstant un nouveau dahir daté du 27 janvier 1920 réservait exclusivement au Maghzen la recherche et l'exploitation des phosphates Que cette réserve était toutefois limitée par la clause du respect des droits acquis par les explorateurs en application de l'article 51 susmentionné Qu'un dahir successif daté du 21 août 1920 fixait la procédure à suivre pour la reconnaissance de ces droits acquis et remettait à des dispositions ultérieures le règlement des indemnités prévues au paragraphe 3 du même article 51 Attendu que par une lettre recommandée en date du 14 octobre 1921 M Costantino Tassara en tant que cessionnaire des permis Busset et Deruis demandait au Service des Mines la reconnaissance de la qualité d'inventeur des gîtes couverts par ces permis Que le Service des Mines après une vaine tentative de retourner la demande apporta un retard abusif à faire connaître sa décision Ce fut seulement le g janvier 1925 que le Service des Mines notifia à M Tassara d'avoir rejeté ladite demande avec la motivation suivante Considérant que l'étude technique à « laquelle il a été procédé montre que dans aucun des permis le 6 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 12 Whereas in accordance with the provisions of the General Act of Algeciras of April 7th 1906 and the Franco-German Agreement of November 4th 1911 to which Italy has since acceded the said Regulations were bound not only to respect the general principle of economic liberty without inequality 'open door' but must also be based upon the system of concessions and 'be guided by the laws governing this matter in foreign countries' Art 112 of the Algeciras Act and finally by French law Art 7 of the Franco-German Agreement Whereas under Article 51 of the Regulations concessions for the working of phosphates might only be disposed of by public award on tenders offering a royalty payable on every ton extracted Whereas in particular it was laid down that 'Prospectors holding prospecting licences for a reserved area who have discovered new phosphate deposits within their area and have shown that they can be worked shall be entitled during a period of fifteen years reckoned from the date of the decision recognizing them as discoverers to one-fifth of the royalties payable on every ton by the successful tenderers ' Whereas on August 4th 1919 the General Board of Public Works published the following note in the Morocco Officia1 Gazette 'Phosphate deposits of considerable extent and of exceptional content have been located in the El Boroudj and Oued Zem districts In accordance with Article 51 of the dahir of January g t h 1914 prescribing mining regulations the right to work these deposits will be disposed of by public tender at a date which the Administration hopes to fix in the near future ' Whereas notwithstanding the above notice a new dahir dated January 27th 1920 reserved exclusively to the Maghzen the right to prospect for and work phosphates Whereas this reservation was however limited by the clause safeguarding the rights which prospectors had acquired under the above-mentioned Article 51 Whereas a subsequent dahir dated August z s t 1920 specified the procedure for the recognition of these vested rights and left the question of the indemnities provided for in paragraph 3 of the said Article 51 to be settled by subsequent provisions Whereas M Costantino Tassara applied to the Department of Mines by registered letter dated October 14th 1921 in his capacity as transferee of the Busset and Deruis licences to be recognized as discoverer of the deposits covered by the said licences Whereas the Department of Mines after unsuccessfully endeavouring to decline the application unreasonably delayed the announcement of its decision and informed M Tassara only on January gth 1925 that it had rejected his above-mentioned request upon the following grounds 'Whereas the technical enquiries which have been carried out show that the applicant A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC demandeur ne remplit à la fois les conditions d'avoir découvert un gîte nouveau et d'en avoir démontré l'exploitabilité Qu'il fut impossible à M Tassara de connaître par la suite les prétendus motifs techniques du rejet de sa demande et d'être ainsi mis à même de présenter au résident général de France le recours gracieux prévu à l'article 8 du dahir du 12 août 1913 Que les autorités du Protectorat et le résident général luimême se retranchèrent dans une attitude évasive d'abord se refusant à permettre la consultation du dossier et finalement opposant que la question avait été définitivement réglée par le Service des Mines Que toutes les démarches ultérieures faites par les intéressés en vue d'obtenir le redressement du tort subi ou un règlement amiable de la question ou tout au moins la désignation de juges compétents pour annuler ou réformer la décision illégale du Service des Mines n'aboutirent à aucun résultat Que les bons offices de l'ambassade royale à Paris restèrent également sans succès Les intéressés et l'ambassade royale firent à maintes reprises considérer que les tribunaux français au Maroc n'ont pas le pouvoir d'annuler les actes de l'Administration publique que les autorités du Protectorat ne sauraient prétendre être à la fois juges et parties et que par conséquent l'ouverture d'un remède judiciaire adéquat s'imposait Le ministère des Affaires étrangères de la République Direction des Affaires politiques et commerciales répondait par sa note du 28 janvier 1933 que la décision du Service des Mines n'est susceptible d'aucun recours mais « si la Société Miniere e Fos« fat estime qu'une faute a été commise par l'Administration du Protectorat à l'occasion de cette décision et en violation des « prétendus droits acquis il lui est loisible d'assigner l'État chéri« fien devant les tribunaux du Protectorat à l'effet d'obtenir les « dommages-intérêts qui seraient dus à raison de cette faute B Que vainement la société intéressée et l'ambassade royale ont entre temps objecté qu'en l'espèce il ne s'agit pas d'allouer des dommages-intérêts mais de respecter des droits acquis ce qui exige en tout cas comme condition préalable l'annulation de la décision du Service des Mines c'est-à-dire une mesure n'étant pas du ressort des tribunaux civils au Maroc Le ministère des Affaires étrangères de la République par sa dernière note du IO mars 1934 a confirmé son point de vue déniant toute satisfaction Attendu que les agissements susindiqués étant déterminés par la même résolution et visant au même résultat constituent un fait illicite continué et permanent qui met en jeu la responsabilité internationale de la France sous différents aspects Que en effet l'établissement du monopole des phosphates est incompatible avec les obligations internationales du Maroc et de la France de respecter au Maroc la liberté économique sans aucune inégalité de baser le règlement minier sur le système A B 74 -PHOSPHATES IN MOROCCO I3 does not fulfil in respect of any of his licences the conditions of having both discovered a new deposit and having shown that it can be worked ' Whereas M Tassara was unable subsequently to ascertain the alleged technical reasons for the rejection of his claim and was accordingly not in a position to address to the French Resident General the petition provided for in Article 8 of the dahir of August z t h 1913 Whereas the authorities of the Protectorate and the ResidentGeneral himself maintained an evasive attitude first refusing to permit reference to the files and finally stating that the question had been definitively settled by the Mines Department Whereas al1 subsequent steps taken by the interested parties to obtain redress for the wrong suffered or a friendly settlement of the question or at al1 events the appointment of competent judges to annul or revise the unlawful decision of the Mines Department led to no result Whereas the good offices of the Royal Embassy at Paris likewise met with no success The interested parties and the Royal Embassy repeatedly urged that the French courts in Morocco have no power to annul the acts of the Public Administration that the authorities of the Protectorate cannot claim to be both judge and suitor and that consequently some adequate judicial remedy must be provided The Ministry for Foreign Affairs of the Republic Directorate of Political and Commercial Affairs replied by its note of January 28th 1933 that there was no appeal from the decision of the Mines Department but that 'if the Miniere e Fosfati Company considered that the Administration of the Protectorate had been at fault in this decision and had violated alleged vested rights it was open to them to bring an action against the Shereefian State before the courts of the Protectorate with a view to obtaining damages in respect thereof' Whereas the Company concerned and the Royal Embassy thereupon represented without success that they were not seeking damages but respect for vested rights and that this in any case entailed as a condition precedent the annulment of the decision of the Mines Department i e a measure not within the jurisdiction of the civil courts of Morocco The Ministry for Foreign Affairs of the Republic in its last note of March o t h 1934 maintained its standpoint refusing any satisfaction Whereas the proceedings above mentioned being inspired by the same purpose and designed to achieve the same object constitute a continuing and permanent unlawful act involving the international responsibility of France in different ways Whereas the establishment of the phosphate monopoly is in effect inconsistent with the international obligations of Morocco and of France that economic freedom in Morocco should be respected without inequality that the mining regulations should I4 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC des concessions conformément à la loi française de limiter les monopoles chérifiens à l'opium au kif et aux tabacs Que deuxièmement la décision du Service des Mines datée du 8 janvier 1925 est entachée d'excès de pouvoir et de détournement de pouvoir Elle contredit le communiqué officiel du 4 août 1919 et sous l'apparence du bien du service vise à écarter la mainmise étrangère redoutée et même le paiement de l'indemnité d'expropriation en dépit des droits acquis qui étaient sous la sauvegarde des conventions internationales Que troisièmement les entraves apportées à la présentation du recours gracieux au résident général et la prétention que la décision du Service des Mines ait définitivement réglé la question contrairement à ce que dispose l'article 8 du dahir du 12 août 1913 portant l'organisation judiciaire du Protectorat constituent un véritable déni de justice Que ce déni de justice a été confirmé et aggravé par le refus de soumettre le différend à une juridiction qualifiée ayant les pouvoirs nécessaires pour redresser le tort subi par la société italienne et pour rétablir la situation conforme au droit interne et au droit international Que la proposition de s'adresser aux tribunaux civils au Maroc en vue d'en obtenir les dommages-intérêts sur la base de la faute n'est pas de nature à donner la satisfaction qui est due et vise plutôt à maintenir les sujets italiens expropriés sans indemnité dans l'état actuel de spoliation Que le différend juridique qui en est surgi n'ayant pu former l'objet d'un compromis d'arbitrage à cause de la persistante attitude évasive du Gouvernement de la République est soumis à la Cour par voie de requête unilatérale Que le Gouvernement royal estime que le fait illicite susindiqué met en jeu la responsabilité internationale de la France à un double titre responsabilité indirecte lui revenant en tant qu'État protecteur du Maroc et responsabilité personnelle et directe découlant d'actes accomplis par des autorités françaises ou avec leur collaboration en vue d'intérêts purement français Qu'il appartient à la Cour d'apprécier l'étendue de ladite responsabilité et la forme de la réparation qui est due Qu'en l'espèce la restitution en nature étant possible la Cour est à même d'ordonner conformément à sa jurisprudence les mesures nécessaires pour effacer toutes les conséquences de l'acte illicite et rétablir la situation qui aurait existé si ledit acte n'avait pas été commis Qu'à cet effet le Gouvernement royal poursuivant la défense intégrale de son droit après l'échec des différentes tentatives de solution amiable se croit fondé à demander que soit rétablie quant aux phosphates du Maroc la liberté économique sacrifiée au profit du monopole illicite ou du moins que soient reconnus et respectés les droits acquis sur la base de l'article 51 du 8 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO I4 be based on the system of concessions in accordance with French law and that the Shereefian monopolies should be confined to opium kif and tobacco Whereas secondly the decision of the Mines Department of January 8th 1925 is ultra vires and constitutes a misuse of power I t conflicts with the officia1 announcement of August 4th 1919 and under the cloak of meeting departmental exigencies aims at getting rid of the dreaded foreign holding and even avoiding the payment of compensation for expropriation in disregard of vested rights which were safeguarded by international conventions Whereas thirdly the obstacles placed in the way of a petition to the Resident-General and the allegation that the decision of the Mines Department had finally settled the question despite the terms of Article 8 of the dahir of August z t h 1913 for the judicial organization of the Protectorate constitute a veritable denial of justice Whereas this denial of justice has been confirmed and aggravated by the refusa1 to submit the dispute to a competent tribunal able to redress the wrong suffered by the Italian Company and to restore the position in accordance with municipal law and international law Whereas the proposa1 that recourse should be had to the civil courts of Morocco with a view to obtaining damages for the wrong suffered is not calculated to give the satisfaction which is due and is designed rather to ensure that the Italian subjects who have been expropriated without compensation shall remain despoiled of their property as a t present Whereas the legal dispute which has arisen could not form the subject of a special arbitration agreement owing to the persistently evasive attitude of the Government of the Republic and is therefore submitted to the Court by a unilateral application Whereas the Royal Government holds that owing to the above-mentioned unlawful act France has incurred international responsibility of two kinds namely indirect responsibility as the State protecting Morocco and persona1 and direct responsibility resulting from action taken by the French authorities or with their CO-operation purely for the sake of French interests Whereas it rests with the Court to appraise the extent of that responsibility and the nature of the reparation which is due Whereas in the present case restitution in kind being possible the Court can in accordance with its jurisprudence order that the necessary steps be taken to efface al1 the consequences of the unlawful act and to restore the situation as it would have been if the aforesaid act had not been commited Whereas the Royal Government being concerned to uphold its full rights after al1 attempts a t an amicable settlement have proved fruitless feels justified in demanding that as regards the Moroccan phosphates the economic freedom which was sacrificed in the interests of the unlawful monopoly should be restored or that a t the least the rights acquired in virtue of 8 règlement minier et portant sur la reconnaissance de la qualité d'inventeur en faveur de la société italienne titulaire des permis de recherche et sur la mise en adjudication des gîtes couverts par ces permis Que l'exploitation phosphatière étant actuellement moins avantageuse que dans les dix ans qui se sont écoulés il y a en outre lieu d'allouer les dommages-intérêts pour les pertes qui ne seraient pas couvertes par la restitutio iw integrum Que si la Cour estime que les droits acquis portent seulement sur l'indemnité d'expropriation le montant de cette indemnité doit être fixé en tenant compte de deux circonstances essentielles que les revenus de l'Office chérifien des Phosphates ainsi qu'il appert des publications officielles ont dépassé jusqu'à présent le montant d'un milliard et que en cas de mise en adjudication la Société Miniere e Fosfati escomptant le cinquième de la redevance lui revenant de la reconnaissance de la qualité d'inventeur aurait pu surenchérir plus que n'importe quel autre concurrent et aurait partant eu la certitude de rester adjudicataire Que en tout cas il y a lieu de réparer une autre catégorie de dommages constituée par les dépenses considérables occasionnées pendant cette longue période par les multiples démarches des intéressés auprès des autorités du Protectorat et métropolitaines En conséquence et sous réserve de tous mémoires contremémoires et en général de tous moyens et preuves à présenter ultérieurement à la Cour Plaise à la Cour Signifier la présente requête conformément à l'article 40 alinéa 2 du Statut de la Cour au Gouvernement de la République française à titre personnel et en tant que protecteur du Maroc Dire et juger tant en présence qu'en l'absence dudit Gouvernement et après tels délais que sous réserve d'accord entre les Parties il appartiendra à la Cour de fixer a que l'accaparement des phosphates marocains effectué par étapes de 1920 à 1934 au profit d'intérêts français est contraire aux obligations internationales du Maroc et de la France et qu'il doit être annulé de ce chef avec toutes les conséquences qui en découlent b subsidiairement que la décision du Service des Mines en date du 8 janvier 1925 et le déni de justice qui l'a suivie sont incompatibles avec l'obligation internationale incombant au Maroc et à la France de respecter les droits acquis par la Société italienne Miniere e Fosfati qu'il est partant du devoir des autorités du Protectorat de reconnaître la qualité d'inventeur en faveur de ladite société et de mettre sans délai en adjudication les gîtes auxquels se réfèrent ses permis c plus subsidiairement qu'une juste indemnité d'expropriation doit être payée d'après les critères que la Cour voudra A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 15 Article 51 of the Mining Regulations shall be acknowledged and respected the rights in question being those relating to the acquisition by the Italian company holding the prospecting licences of the status of discoverer and to the disposal by public tender of the deposits covered by the licences Whereas the working of phosphates being now less profitable than during the past ten years it would further be fitting to award damages for the losses not covered by the restitutio in integrthm Whereas in case the Court should hold that the vested rights only extend to compensation for expropriation the amount of that compensation must be assessed with due regard to two essential circumstances namely that the revenues of the Shereefian Phosphates Office up to date have exceeded one miuiard as shown by the officia1 publications and that if the rights had been disposed of by public tender the Miniere e Fosfatz' Company being able to get the benefit of the one-fifth share of the royalties accruing to it as the recognized discoverer could have outbid any other competitor and would therefore have infallibly been the successful tenderer Whereas in any case compensation will be necessary for damage of another kind represented by the considerable expense to which the interested parties have been put during this long period owing to the protracted negotiations in which they have had to engage with the authorities of the Protectorate and with the French authorities In view of the foregoing and subject to the subsequent presentation to the Court of any memorials counter-memorials and in general of any documents or evidence May it please the Court To notify the present application in conformity with Article 40 paragraph 2 of the Court's Statute to the Government of the French Republic as such and as protector of Morocco To judge and declare whether the said Government enters an appearance or not and after such time-limits as the Court may fix in the absence of an agreement between the Parties a that the monopolization of the Moroccan phosphates which was accomplished by stages between 1920 and 1934 for the benefit of French interests is inconsistent with the international obligations of Morocco and of France and that it must for that reason be annulled with al1 the consequences that ensue b alternatively that the decision of the Mines Department dated January Sth 1925 and the denial of justice which followed it are inconsistent with the international obligation incumbent upon Morocco and upon France to respect the rights acquired by the Italian Company Miniere e Fosfati and therefore that the Protectorate authorities are bound to recognize the said company as discoverer and to invite tenders without delay for the working of the deposits covered by the company's licences c alternatively again that fair compensation must be paid for expropriation such compensation to be assessed by the 9 fixer en tenant compte des énormes revenus de l'Office chérifien des Phosphates d qu'une réparation pécuniaire supplémentaire est due soit pour les pertes et les dommages qui ne sont pas couverts par la réparation principale prévue sub a soit en tout cas pour les dépenses occasionnées à la société intéressée par la défense de ses droits antérieurement à la présente requête » A la date du 30 mars 1936 la requête du Gouvernement italien a été notifiée au Gouvernement français le 8 avril 1936 elle a fait l'objet des communications visées aux articles 40 du Statut et 34 du Règlement En outre le 23 mai 1936 le Greffier avertit conformément aux articles 63 du Statut et 66 du Règlement les États-Unis d'Amérique la Belgique la Grande-Bretagne l'Espagne les Pays-Bas le Portugal et la Suède Parties à l'Acte général d'Algésiras du 7 avril 1906 certaines de ces Puissances ayant en outre adhéré à la Convention franco-allemande relative au Maroc du 4 novembre 1911 Par ordonnance du 18 juin 1936 la Cour a fixé au 15 juillet 1936 le délai imparti au Gouvernement italien pour la présentation de son Mémoire dans l'affaire elle a également fixé le délai afférent au dépôt du Contre-Mémoire du Gouvernement français Ce dernier délai a été prorogé au 17 décembre 1936 par une ordonnance rendue par le Président de la Cour à la date du 30 septembre 1936 Dans son Mémoire présenté dans le délai fixé ainsi qu'il est dit ci-dessus le Gouvernement italien a confirmé les conclusions formulées dans la requête Dans le délai prévu pour le dépôt du Contre-Mémoire le Gouvernement français a déposé une pièce intitulée Phosphates du Maroc Exceptions préliminaires présentées au nom du Gouvernement de la République française Dans cette pièce il a formulé les exceptions et la conclusion suivantes Plaise à la Cour Attendu que le Gouvernement royal d'Italie n'a pas fait connaître l'objet de sa demande dans des conditions de précision et de clarté correspondant aux exigences d'une bonne administration de la justice et aux prescriptions de l'article 32 alinéa 2 et de l'article 42 du Règlement de la Cour Qu'en particulier il n'a pas expliqué ce qu'il entend obtenir en demandant que l'accaparement des phosphates soit annulé avec toutes les conséquences qui en découlent Attendu que le Gouvernement royal d'Italie n'a pas clairement expliqué le titre de compétence de la Cour sur lequel il entend s'appuyer pour saisir celle-ci par voie de requête et que par là il ne s'est pas suffisamment conformé à l'article 32 du Règlement de la Cour Qu'en particulier il ne s'est aucunement attaché à faire apparaître si et comment les diverses parties de sa demande rentrent dans les prévisions de l'article 36 alinéa 2 du Statut de la Cour et des déclarations des deux Gouvernements acceptant la juridiction obligatoire de la Cour A B 74 --PHOSPHATES I N MOROCCO 16 Court with due regard to the immense revenues of the Shereefian Phosphates Office d that additional pecuniary compensation is due for loss and damage not covered by the main indemnity referred to under a above and in any case for the expenses in which the Company was involved by the defence of its rights prior to the submission of the present application On March 3oth 1936 notice of the Application of the Italian Government was given to the French Government and on April 8th 1936 the communications provided for in Article 40 of the Statute and Article 34 of the Rules were duly despatched Furthermore on May 23rd 1936 the Registrar in accordance with Article 63 of the Statute and Article 66 of the Rules notified the United States of America Belgium Great Britain the Netherlands Portugal Spain and Sweden as Parties to the General Act of Algeciras of April 7th 1906 certain of these Powers having moreover adhered to the FrancoGerman Convention concerning Morocco of November 4th 1911 By an Order made on June 18th 1936 the Court fixed July 15th as the date for the expiry of the time-limit allowed to the Italian Government for the filing of its Memorial it also fured the timelimit for the filing of the French Government's Counter-Memorial The latter time-limit was extended until December 17th '1936 by an Order made by the President of the Court on September 3oth 1936 In its Memorial which was duly filed within the time-limit fixed for that purpose the Italian Government maintained the submissions made in the Application Within the time-limit for the filing of the Counter-Memorial the French Government filed a document entitled Phosphates in Morocco Preliminary Objections filed on behalf of the French Government In this document it presented objections and made the following submission May it please the Court Whereas the Royal Italian Government has not stated the nature of its claim within the degree of precision and clearness requisite for the administration of justice and prescribed by Article 32 paragraph 2 and Article 42 of the Rules of Court Whereas in particular it has not explained what it seeks to obtain by asking for the abolition of the monopolization of phosphates with al1 the consequences that ensue Whereas the Royal Italian Government has not clearly explained the grounds of iurisdiction on which it relies in bringing the case before the Court by Application and as accordingly it has not adequately complied with the terms of Article 32 of the Rules of Court Whereas in particular it has made no attempt to show whether or how the various parts of its clairn are covered by the terms of Article 36 paragraph 2 of the Court's Statute and of the declarations made by the two Governments accepting the compulsory jurisdiction of the Court 17 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Attendu que le Gouvernement royal d'Italie agissant en l'espèce comme protecteur de ses nationaux avait le devoir d'établir à la satisfaction de la Cour et conformément aux exigences du droit international le caractère national de la réclamation concernant la Société Miniere e Fosfati Que loin de le faire le Gouvernement royal d'Italie n'a fourni à cet égard que des renseignements insuffisants sans tenter de combler les lacunes ou d'expliquer les contradictions qui apparaissent à la lecture des documents par lui produits Que de son côté le Gouvernement de la République fran$aise a soumis à l'attention de la Cour des faits qui pour le moins font surgir des doutes sur le caractère italien de ladite réclamation Qu'en particulier le Gouvernement royal d'Italie n'a pas fourni d'explications et preuves suffisantes touchant la date des cessions consenties par les sieurs Busset et Frier Deruis les bénéficiaires de ces cessions le rôle joué par le sieur Tassara la transmission alléguée à la Société Miniere e Fosfati et le caractère de cette société la cession à une société américaine et la résiliation de ladite cession En ce qui concerne la partie de la requête qui vise le prétendu accaparement illicite des phosphates Attendu que cette question n'a fait l'objet d'aucun examen par la voie diplomatique et qu'en conséquence elle ne saurait 4tre déférée à la Cour par voie de requête sur la base des déclarations par lesquelles la France et l'Italie ont accepté la juridiction obligatoire de la Cour En ce qui concerne la partie de la requête qui vise la réclamation de la Société Miniere e Fosfati Attendu qu'un recours est ouvert à ladite société devant les tribunaux civils du Protectorat statuant en matière administrative et que ce recours n'a pas été épuisé ni même tenté Que dès lors il y a lieu de faire application en l'espèce de la règle qui subordonne la réclamation diplomatique et par voie d e conséquence l a requête à la Cour sur la base de l'article 36 alinéa 2 du Statut à l'épuisement des recours internes aucune circonstance de la cause n'autorisant à déroger à ladite règle Pour l'ensemble de la requête Attendu que le différend dont le Gouvernement royal d'Italie a saisi la Cour s'est élevé au sujet de situations et de faits antérieurs au 7 septembre 1931 et que dès lors il échappe à la juridiction obligatoire de la Cour telle qu'elle est fixée entre la France et l'Italie par les déclarations émanant à cet égard des deux Gouvernements Pour ces motifs et tous autres qui pourraient être présentés ou que la Cour jugerait à propos d'y ajouter ou substituer Dire et juger que la requête présentée le 30 mars 1936 par le Gouvernement royal d'Italie est irrecevable 4 B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO I7 Whereas it was incumbent on the Royal Italian Government acting as protector of its nationals to demonstrate to the satisfaction of the Court and in accordance with the requirements of international law that the claim concerning the Miniere e Fosfati Company is of a national character Whereas far from so doing the Royal Italian Government has only furnished inadequate information on this point and has not attempted to make good the omissions or to explain the inconsistencies apparent from a perusal of the documents which it has produced Whereas for its part the Government of the French Republic has drawn the attention of the Court to facts which to say the least give rise to doubts as to whether the said claim is Italian Whereas in particular the Royal Italian Government has not furnished adequate explanations and evidence as to the date of the transfers by MM Busset and Frier Deruis or as to the transferees the part played by M Tassara the alleged assignment to the Miniere e Fosfati Company and the character of that company or the transfer to an American company and its cancellation With regard to the part of the Application relating to the alleged unlawful monopolization of phosphates Whereas this question has not been investigated through 1 diplomatic channels and as accordingly it cannot be submitted to the Court by application on the basis of the declarations whereby France and Italy have accepted the compulsory jurisdiction of the Court With regard to the part of the Application relating to the claim of the Miniere e Fosfati Company Whereas it is open to this company to have recourse to the civil courts of the Protectorate adjudicating upon administrative questions and as this means of redress has not been exhausted or even tried Whereas accordingly in this case the rule subordinating diplomat-ic action and consequently application t o the Court under Article 36 paragraph 2 of the Statute to the exhaustion of local means of redress applies there being no circumstances in the case justifying a departure from this rule With regard to the Application as a whole Whereas the dispute which the Royal Italian Government has submitted to the Court has arisen in regard to situations or facts prior to September 7th 1931 and as accordingly it falls outside the scope of the Court's compulsory jurisdiction as determined between France and Italy by the declarations on the subject made by the two Governments i For these reasons and for any others which may be submitted or which the Court may see fit to add or substitute To adjudge and declare that the Application filed on March 3oth 1936 by the Royal Italian Government cannot be entertained 18 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Au vu de cette pièce Je Président de la Cour a rendu le 18 décembre 1936 une ordonnance par laquelle considérant que aux termes de l'article 62 alinéa 3 du Règlement de la Cour la procédure sur le fond était suspendue en l'espèce il a imparti un délai au Gouvernement italien pour le dépôt d'un exposé écrit contenant ses observations et conclusions sur les exceptions soulevées par le Gouvernement français Ce délai a été prorogé au 15 juillet 1937 par une ordonnance rendue le 13 avril 1937 par le Président de la Cour L'exposé écrit du Gouvernement italien déposé dans le délai fixé a en ce qui concerne les exceptions préliminaires conclu dans les termes suivants « Attendu que la requête du Gouvernement royal complétée par le Mémoire est assez claire pour tous ceux qui n'ont pas intérêt à ne pas la comprendre qu'en effet la Partie défenderesse l'a tellement comprise que pas une question voire pas une allégation soutenue par le Gouvernement royal n'est restée sans réponse dans le document qu'elle a déposé que les prétendues obscurités touchant l'objet de la demande sont artificieusement créées pour les besoins de la cause que le Gouvernement royal estime avoir soumis à la Cour dans des conditions de précision et de clarté suffisantes le différend surgi à l'occasion de 1'« accaparement » des phosphates marocains au profit de la France sous le couvert de l'État protégé que le mot accaparement » a été explicitement employé pour désigner la série des actes accomplis à ladite fin de 1920 à 1934 que c'est toute la série de ces actes qui aux termes de la conclusion principale de la requête doit être annulée non pas par l a Cour mais par effet d'un arrêt déclaratoire de la Cour avec toutes les conséquences qui en découlent que ce dernier membre de phrase a été ajouté pour marquer l'intégralité de la revendication principale qui dans l'intention du Gouvernement demaildeur s'étend à toutes les mesures constituant les suites nécessaires ou le complément du monopole et de l'éviction des particuliers italiens en particulier au cartel nord-africain au sujet duquel le Gouvernement royal n'était pas assez renseigné au moment de la requête que les conclusions subsidiaires b et c formulées en conformité de la jurisprudence de la Cour visent les hypothèses qu'il plaise à la Cour ne retenir que la mainmise illicite sur les droits appartenant à des Italiens ou graduellement l'expropriation de ces mêmes droits que la conclusion d vise l'indemnité supplémentaire que de telles conclusions éclaircies par le Mémoire suffisent pour permettre au différend de s'ouvrir et rien n'empêche qu'elles reçoivent quelque précision ultérieure lors de la discussion de l'affaire au fond Attendu que le titre de compétence de la Cour est clairement indiqué dans l a requête que ce titre consiste dans les déclarations d'adhésion de l'Italie et de la France à la disposition facultative de l'article 36 alinéa 2 du Statut de la Cour permanente qu'il ne fallait pas s'attacher particulièrement à faire apparaître si et comment les diverses parties de la demande A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 18 On receipt of this document the President of the Court having regard to the terms of Article 62 paragraph 3 of the Rules of Court suspending the proceedings on the merits made an Order on December 18th 1936 giving the Italian Government a time-limit for the filing of a written statement of its observations and submissions in regard to the objections lodged by the French Government This time-limit was extended until July 15th 1937 by an Order made by the President of the Court on April 13th 1937 The Italian Government in its written statement which was duly filed within the prescribed time-limit presented the following submissions in regard to the preliminary objections Whereas the Royal Government's Application supplemented by the Memorial is sufficiently clear for al1 who have no motive for failing to understand it and whereas in fact the respondent Party has understood it so well that not a single question nor any allegation put forward by the Royal Government has been left unanswered in the document filed by that Party whereas the alleged obscurities in regard to the nature of the claim have been artificially contrived for the needs of the case whereas the Royal Government considers that it has submitted to the Court with al1 necessary particulars and clarity the dispute that has arisen over the monopolization of the Moroccan phosphates for the benefit of France through the medium of the protected State whereas the word 'monopolization' has been expressly used to indicate the series of acts performed with that end in view between 1920 and 1934 whereas it is the whole of this series of acts which has to be annulled with aU the consequences that ensue in accordance with the main submission of the Application not by the Court but pursuant to a declaratory judgment by the Court this phrase as to al1 the consequences being added to indicate the allinclusive character of the main submission which in the applicant Government's mind covers al1 the measures necessary to give effect to or designed to complete the monopoly or the dispossession of the Italian private citizens and covers in particular the North-African cartel in regard to which the Royal Government was not sufficiently informed when the Application was drawn up and whereas the alternative submissions b and c put forward in accordance with the Court's jurisprudence are framed in view of hypotheses among which the Court is only asked to consider the unlawful seizure of the rights appertaining to the Italians or the gradua1 expropriation of the said rights whereas submission d relates to additional compensation whereas such submissions elucidated by the Memorial suffice to enable the proceedings to be opened without prejudice to the possibility of further elucidating the submissions during the discussion on the merits Whereas the ground of the Court's jurisdiction is clearly indicated in the Application and whereas this ground consists of the declarations of Italy and France acceding to the Optional Clause of Article 36 paragraph 2 of the Statute of the Permanent Court and whereas there was no occasion to go into detailed explanations as to whether and in what manner the 12 rentrent dans les prévisions dudit article et des déclarations des deux Gouvernements étant donné que les diverses parties de la demande se rangent manifestement tantôt dans l'une tantôt dans l'autre des catégories de différends prévues et qu'elles concernent toutes ces catégories Attendu que le caractère italien de la réclamation est audessus de toute tentative de déformation ainsi qu'il est d'ailleurs prouvé par le fait que jamais la Partie défenderesse n'a soulevé une objection à cet égard durant les pourparlers diplomatiques préalables que dans ces conditions la Partie défenderesse n'est nullement fondée à conclure à l'irrecevabilité de la requête sans examen que la réalité et la date du transfert des permis de Busset et Deruis à Tassara sont suffisamment prouvées par les lettres que ces trois messieurs adressèrent à son temps au Service des Mines et par le fait que le Service des Mines a pris et donné acte de ce transfert que M Tassara ressortissant italien était le gérant d'une association en participation - dont l'existence n'a pas été cachée au Service des Mines - formée presque exclusivement d'Italiens qu'il n'y avait en effet comme étrangers que MM Colle-Deudon et Levy que l'association en participation ne donnant pas lieu à une personne juridique c'est la nationalité du gérant - Tassara qui est décisive qu'en tout cas une association formée à Gênes en conformité de la loi italienne sous contrôle italien et par une majorité prépondérante d'Italiens ne saurait être qu'italienne que les transferts successifs de M Tassara à M de Gennaro Musti et de M de Gennaro Musti à la Société anonyme Miniere e Fosfati laissèrent les permis toujours entre mains italiennes que l'unique circonstance susceptible de justifier quelque doute est la cession d'une partie des permis à l'American and Moroccam Phosphate Corfioration que toutefois rien ne saurait découler de ce fait en faveur des conclusions de la Partie défenderesse qu'en effet une partie des permis est restée en possession de la société italienne ce qui suffit à rendre recevable la requête du Gouvernement royal dans toutes ses conclusions que la cession n'a pas tardé à être résiliée qu'au surplus l'attitude intransigeante du Gouvernement de la République ayant placé la société américaine dans l'impossibilité de verser même des acomptes sur le prix de la cession la société italienne a toujours gardé un intérêt juridique appréciable à la bonne issue de l'affaire intérêt qui est un support suffisant pour que la réclamation du Gouvernement royal s'étende à la totalité des permis Attendu que les négociations diplomatiques préalables ont embrassé tout entière la controverse soumise à la Cour qu'en affirmant le contraire en ce qui concerne les mesures d'ordre général établissant et organisant le monopole des phosphates et le cartel nord-africain la Partie défenderesse oublie les clairs avertissements que lui ont donnés les intéressés l'ambassade italienne et l'agent du Gouvernement royal qu'elle oublie en outre les démarches qu'elle a essayé de faire à Rome et deux notes remises l'une à M Laval lors de son voyage à Rome et l'autre au Quai d'Orsay par l'ambassadeur d'Italie I 13 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO I9 different parts of the claim fa11 within the terms of the said Article and of the two Governments' declarations seeing that the different parts of the claim manifestly fa11 within one or other of the categories of disputes referred to and relate to al1 these categories Whereas the Italian character of the claim is clear beyond al1 cavil as is indeed shown by the fact that the respondent Party raised no objection on that score during the preliminsry diplomatic discussions whereas the respondent Party has thus no justification for submitting that the claim should without examination be declared inadmissible whereas the fact and the date of the transfer of the licences from Busset and Deruis t o Tassara are sufficiently proved by the letters which these three persons wrote a t different times to the Department of Mines and by the fact that the Mines Department acknowledged and recorded this transfer whereas M Tassara an Italian national was the manager of a partnership association consisting almost entirely of Italians the existence of which was not unknown to the Department of Mines indeed the only non-Italians were MM Colle-Deudon and Levy whereas since the partnership association did not possess a legal personality the nationality of the manager-Tassara-is the decisive factor whereas an association constituted a t Genoa in accordance with Italian law under Italian control and having a large majority of Italian members could not be other than Italian whereas the successive transfers from M Tassara to M de Gennaro Musti and from M de Gennaro Musti to the Mz'nz'ere e Fosfatz' Company left the licences still in Italian hands whereas the only circumstance capable of raising any doubt was the sale of some of the licences to the 'American and Moroccan Phosphate Corporation' whereas however nothing can be deduced from that fact in favour of the submissions of the respondent P a r t y whereas indeed a certain number of the licences remained in the hands of the Italian company a fact which suffices to enable the Royal Government's claim to be entertained with al1 its submissions whereas the sale was soon afterwards cancelled whereas moreover the unyielding attitude of the Government of the Republic made it impossible for the American company to pay even a sum on account of the purchase price so that the Italian company still retained a substantial legal interest in a successful issue an interest which is sufficient warrant for the extension of the Royal Government's claim to al1 the licences Whereas the preliminary diplomatic negotiations covered the whole of the controversy submitted to the Court whereas the Respondent in affirming the contrary in so far as concerns the general measures establishing and organizing the phosphates monopoly and the North-African cartel overlooks the posirive statements made to it by the interested parties by the Italian Embassy and by the Royal Government's Agent whereas it also overlooks the démarches sought to be made in Rome and the two notes one of which was handed to M Laval on the occasion of his visit to Rome and the other to the Quai d'Orsay by the Italian Ambassador 13 20 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Attendu que la règle de l'épuisement préalable des voies de recours internes ne s'impose pas en l'espèce étant donné que la Partie défenderesse a nettement refusé le recours gracieux et prétend se prévaloir des lacunes de l'organisation judiciaire marocaine qui n'offre aucun remède adéquat à l'encontre des décisions administratives adoptées dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire et entachées de détournement de pouvoir que vainement la Partie défenderesse s'est appliquée à démontrer que la décision du Service des Mines concernant la nouveauté et l'exploitabilité des gîtes ne relevait que de la compétence liée de l'Administration et vainement encore elle voudrait faire croire qu'il ne pourrait s'agir en l'espèce que d'une simple erreur de fait que toutes les affirmations contenues dans le document adverse à propos de ces deux aspects de la controverse négligent la réalité et s'éloignent des enseignements les pliis sûrs de la doctrine française Attendu que les faits et les situations au sujet desquels s'est élevé le différend ne sont pas antérieurs à la date à laquelle est entrée en vigueur l'acceptation de la juridiction de la Cour dans les rapports entre les deux États qu'en effet la controverse porte tantôt sur des faits qui se sont matériellement vérifiés après la date susindiquée tantôt sur des situations permanentes qui sont même une réalité actuelle qu'en outre ces faits et situations donnent lieu dans leur ensemble à un fait illicite continué et progressif l'accaparement des phosphates qui tombe sous le coup de la juridiction obligatoire à un double titre en tant qu'il s'est perfectionné à une date postérieure à celle qiii est décisive et qu'il entraîne une situation de plus vaste portée qui continue à violer même aujourd'hui la loi internationale Pour ces motifs et tous autres qui pourraient être présentés ou que la Cour jugerait à propos d'y ajouter ou substituer Dire et juger que la requête présentée le 30 mars 1936 par le Gouvernement royal d'Italie est recevable dans sa totalité 1 Par ordonnance du 20 septembre 1937 la Cour sur demande de l'agent du Gouvernement français a autorisé celui-ci conformément à l'article 62 alinéa 4 du Règlement à présenter dans un délai expirant le 17 novembre 1937 une réponse écrite aux observations et conclusions qui figuraient dans l'exposé du Gouvernement italien la Cour a également réservé pour une ordonnance à rendre ultérieurement la fixation d'un délai afférent au dépôt par l'agent du Gouvernement italien d'observations écrites visant ladite réponse La Réponse du Gouvernement français a été déposée dans le délai fixé Sur demande de l'agent du Gouvernement italien le Président de la Cour a fixé par une ordonnance rèndue le 8 décembre 1937 au 21 février 1938 le délai pour le dépôt par ledit agent de ses Observations écrites visant la Réponse du Gouvernement français A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 20 Whereas the rule concerning the previous exhaustion of local remedies does not apply in this case because the Respondent has definitely refused the means of redress by way of petition and seeks to take advantage of the lacunæ in the judicial organization of Morocco which affords no adequate remedy in respect of administrative decisions taken in the exercise of discretionary powers and amounting to a misuse of powers whereas the Respondent has sought unsuccessfully to establish that the decision of the Mines Department on the question whether the deposits were new and workable was only given in the exercise of the Administration's non-discretionary powers and again has sought unsuccessfully to make out that in this case the only possible issue is a simple mistake of fact and as al1 the assertions made in the document presented by the other side with regard to these two aspects of the controversy overlook the actual facts and disregard the most positive teachings of French legal doctrine Whereas the facts and situations in regard to which the dispute arose are not anterior to the date on which the acceptance of the Court's jurisdiction became effective as between the two States whereas the controversy relates either to facts which actually occurred after the date referred to or to permanent situations which still persist a t the present time whereas furthermore these facts and situations taken together constitute an unlawful continuing and progressive course of action the monopolization of the phosphates which falls within the Court's compulsory jurisdiction on two grounds first because i t was completed at a date subsequent to the crucial date and secondly because it gives rise to a situation of wider aspect which still constitutes a continuing violation of international law For these reasons and for any others which may be submitted or which the Court may see fit to add or to substitute May it please the Court to adjudge and declare that the Application filed on March 3oth 1936 by the Royal Italian Government can be entertained in its entirety At the request of the Agent for the French Government the Court on September zoth 1937 made an Order authorizing that Agent under Article 62 paragraph 4 of the Rules to file a written answer to the observations and submissions contained in the statement of the Italian Government within a time-limit expiring on November 17th 1937 the Court a t the same time stated that if need be it would make a subsequent order fixing a time-limit for the filing by the Agent for the Italian Government of written observations in regard to this answer The French Government's Answer was duly filed within the prescribed time-limit At the request of the Agent for the Italian Government the President of the Court made an Order on December 8th 1937 fixing as the date for the expiry of the time-limit for February z s t 1938 the filing by that Agent of written Observations in regard to the Answer of the French Government 14 21 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Les Nouvelles Observations écrites du Gouvernement italien ont été dûment déposées le 21 février 1938 en conséquence c'est à cette date que l'affaire s'est trouvée en état en ce qui concerne les exceptions soulevées par le Gouvernement français Au cours des audiences publiques tenues les 2 3 4 5 6 IO II 12 13 14 et 16 mai 1938 la Cour a entendu pour la France M Basdevant agent et Me Lémonon agentadjoint et pour l'Italie M Montagna agent et M Ago conseil Les conclusions énoncées dans les pièces de la procédure écrite n'ont pas été de part ou d'autre modifiées substantiellement ail cours de la procédure orale Des documents justificatifs ont été déposés au nom de chacune des Parties l C'est en cet état de la procédure que la Cour est appelée à statuer sur les exceptions préliminaires présentées par le Gouvernement français Les faits et circonstances qui sont à l'origine du différend entre l'Italie et la France sont relatés dans la requête du Gouvernement italien Sans se prononcer aucunement sur les divergences de vues auxquelles ces faits et circonstances donnent lieu entre les Parties la Cour peut en renvoyant à cet exposé se borner à n'en retenir aux fins du présent arrêt limité à l'examen de sa juridiction que ceux dont la réalité et la date ne sont pas contestées Le Gouvernement français a d'abord attiré l'attention de la Cour sur certaines obscurités concernant l'objet de la demande La Cour estime que les précisions qui ont été apportées au cours de la procédure écrite et de la procédure orale lui permettent de se former une idée suffisamment claire de l'objet de la demande contenue dans la requête du Gouvernement italien Parmi les exceptions préliminaires opposées par le Gouvernement français à la recevabilité de la requête il en est une qui pour l'ensemble de la requête conteste la juridiction obligatoire de la Cour telle qu'elle a été fixée entre la France et l'Italie par les déclarations émanant à cet égard des deux Gouvernements Le premier devoir de la Cour est donc de statuer sur cette exception aux fins de vérifier le fondement de sa juridiction La déclaration portant acceptation par la France de la juridiction obligatoire de la Cour déclaration dont l'instrument de ratification a été déposé le 25 avril 1931 est ainsi conçue 1 15 Voir bordereau à l'annexe A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 21 The Further Written Observations of the Italian Government were duly filed on February z s t 1938 accordingly on that date the case became ready for hearing in regard to the objections lodged by the French Government In the course of public sittings held on May znd 3rd 4th 5th 6th o t h in th Inth q t h 14th and 16th 1938 the Court heard M Basdevant Agent and Me Lémonon Assistant Agent on behalf of France and M Montagna Agent and M Ago Counsel on behalf of Italy The submissions formulated in the documents of the written proceedings were not in substance amended on either side in the course of the oral proceedings Documents in support of their contentions were filed on behalf of each Party l The above being the state of the proceedings the Court must now adjudicate upon the preIiminary objections lodged by the French Government The facts and circumstances out of which the dispute between Italy and France originated are set out in the Application of the Italian Government Without expressing any opinion upon the divergencies of view to which these facts and circumstances gave rise between the Parties the Court in referring to this statement may for the purposes of the present judgment which is limited to the question of its jurisdiction confine itself to considering those the existence and date of which are not disputed The French Government has in the first place drawn the attention of the Court to certain obscurities relating to the nature of the claim The Court considers that the explanations furnished in the course of the written and oral proceedings enable it to form a sufficiently clear idea of the nature of the claim submitted in the Italian Government's Application Among the preliminary objections which the French Government has lodged against the admissibility of the Application is one which contests in regard to the Application as a whole the compulsory jurisdiction of the Court as established between France and Italy by the declarations of the two Governments The Court must therefore first adjudicate upon this objection in order to satisfy itself as to the grounds of its jurisdiction The declaration by which France accepted the Court's compulsory jurisdiction and of which the ratification was deposited on April 25th 1931 was worded as follows See list in Annex 15 22 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC « Au nom du Gouvernement de la République française je déclare sous réserve de ratification reconnaître comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale vis-à-vis des autres Membres ou États qui acceptent la même obligation la juridiction de la Cour conformément à l'article 36 paragraphe 2 du Statut de ladite Cour pour une durée de cinq années sur tous les différends qui s'élèveraient après la ratification de la présente déclaration au sujet des situations ou des faits postérieurs à cette ratification et qui n'auraient pu être réglés par une procédure de conciliation ou par le Conseil aux termes de l'article 15 alinéa 6 du Pacte sous réserve du cas où les Parties seraient convenues ou conviendraient d'avoir recours à un autre mode de règlement arbitral Cette déclaration remplace la déclaration du 2 octobre 1924 devenue caduque Le Gouvernement français fonde son exception sur les termes suivants de sa déclaration sur tous les différends qui s'élèveraient après la ratification de la présente déclaration au sujet des situations ou des faits postérieurs à cette ratification n Il soutient que le différend dont le Gouvernement royal d'Italie a saisi la Cour s'est élevé au sujet de situations et de faits qui ne rentrent pas dans ces termes La déclaration portant acceptation par l'Italie de la juridiction obligatoire de la Cour dont l'instrument de ratification a été déposé le 7 septembre 1931 est ainsi conçue « Le Gouvernement de l'Italie déclare reconnaître comme obligatoire de plein droit vis-à-vis de tout autre Membre ou État acceptant la même obligation et pour la durée de cinq ans sous réserve de tout moyen de solution prévu par une convention spéciale et dans le cas où une solution par la voie diplomatique ou éventuellement par l'action du Conseil de la Société des Nations n'interviendrait pas la juridiction de la Cour sur les catégories suivantes de différends d'ordre juridique qui pourraient se vérifier après la ratification de la présente déclaration ayant pour objet a interprétation d'un traité b tout point de droit international c la réalité de tout fait qui s'il était établi constituerait la rupture d'une obligation internationale d la nature ou l'étendue de la réparation due pour la rupture d'une obligation internationale Cette déclaration ne porte pas la limitation qui concerne les situations ou les faits au sujet desquels le différend s'est élevé et qui se trouve dans la déclaration de la France mais il est reconnu que par l'effet de la condition de réciprocité inscrite au paragraphe 2 de l'article 36 du Statut de la Cour cette limitation fait droit entre les Parties Les termes de la déclaration française limitent ratione temq5oris la portée de l'acceptation par la France de la juridiction obligatoire de la Cour Cette limitation est double Elle concerne 16 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 22 T anslation On behalf of the Government of the French Republic and subject to ratification 1 accept as compulsory ipso facto and without special agreement in relation to other Members or States accepting the same obligation the jurisdiction of the Court in conformity with Article 36 paragraph z of the Statute of the Court for a period of five years in any disputes which may arise after the ratification of the present declaration with regard to situations or facts subsequent to such ratification and which it has not been possible to settle by conciliation proceedings or through the Council under Article 15 paragraph 6 of the Covenant without prejudice to a case where the Parties have agreed or shall agree to have recourse to another method of settlement by arbitration This declaration replaces the declaration of October znd 1924 which has lapsed The French Government bases its objection on the following passage in its declaration in any disputes which may arise after the ratification of the present declaration with regard to situations or facts subsequent to this ratification I t maintains that the dispute which the Royal Government of Italy has submitted to the Court arose with regard to situations and facts which are not covered by those terms The declaration by which Italy accepted the Court's compulsory jurisdiction and of which the ratification was deposited on September 7th 1931 is as follows Translation The Italian Government declares that it recognizes as compulsory ipso facto in relation to any other Member or State accepting the same obligation for a period of five years and without prejudice to any other method of settlement provided for in a special convention and if a solution through the diplomatic channel or by proceedings before the Council of the League of Nations should not be reached the jurisdiction of the Court in the following classes of legal disputes arising after the ratification of the present declaration and relating to i 1 a the interpretation of a treaty b any question of international law c the existence of any fact which if established would constitute a breach of an international obligation d the nature or extent of the reparation to be made for the breach of an international obligation This declaration does not contain the limitation that appears in the French declaration concerning the situations or facts with regard t o which the dispute arose nevertheless as a consequence of the condition of reciprocity stipulated in paragraph 2 of Article 36 of the Statute of the Court it is recognized that this limitation holds good as between the Parties The terms of the French declaration limit the scope of France's acceptance of the Court's compulsory jurisdiction ratione temporis This limitation is twofold I t relates in the first place to the A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC 23 en premier lieu la date à laquelle s'élève le différend lui-même Ce point n'est pas l'objet de l'exception présentée par le Gouvernement français en fait celui-ci ne conteste pas que le différend s'est élevé après la ratification de la déclaration Il n'y a donc pas lieu de s'y arrêter La deuxième limitation contenue dans la déclaration a trait à la date des situations ou des faits au sujet desquels le différend s'élève C'est de cette limitation que se prévaut le Gouvernement français pour soutenir que les situations et les faits dont procède le différend actuel étant antérieurs à la date de son acceptation de la juridiction obligatoire - date ci-après désignée sous le terme « date critique - la requête du Gouvernement italien est irrecevable Cette manière de voir est contestée par le Gouvernement italien qui soutient que le différend procède d'éléments postérieurs à l'acceptation de la juridiction obligatoire par la France soit que certains faits considérés isolément constituent par euxmêmes des faits illicites internationaux matériellement accomplis après la date critique soit que mis en rapport avec des faits antérieurs auxquels ils sont intimement unis ils constituent dans leur ensemble un seul fait illicite continué et progressif qui n'est arrivé à sa perfection qu'après la date critique soit enfin que certains faits bien que réalisés à une époque antérieure à la date critique aient donné naissance à une situation permanente contraire au droit international et qui s'est prolongée au delà de cette date En présence de ces allégations la Cour est appelée à interpréter les termes de la déclaration du Gouvernement français qui sont à la base de son exception préliminaire et à rechercher si par leur date les situations ou les faits qui sont invoqués par le Gouvernement italien comme formant l'objet du différend et engageant la responsabilité internationale de la France tombent ou non sous le coup de la limitation apportée par le Gouvernement français à son acceptation de la juridiction obligatoire La déclaration dont l'instrument de ratification a été déposé par le Gouvernement français le 25 avril 1931 est un acte unilatéral par lequel ce Gouvernement a accepté la juridiction obligatoire de la Cour La juridiction n'existe que dans les termes où elle a été acceptée Dans l'espèce les termes qui forment la base de l'exception ratione temporis présentée par le Gouvernement français sont parfaitement clairs e u l srelèvent de la juridiction obligatoire les situations ou les faits postérieurs à la date de la ratification au sujet desquels s'est élevé le différend c'est-à-dire ceux qui doivent être considérés comme générateurs du différend Dans ces conditions il n'est pas nécessaire de recourir à l'interprétation restrictive qui dans le doute pour ait se recommander à l'égard d'une clause dont l'inter17 A E 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 23 date on which the actual dispute arose That point is not however the subject of the objection raised by the French Government the latter does not indeed deny that the dispute arose after the ratification of the declaration There is no need therefore for the Court to concern itself with that point The second limitation in the declaration relates to the date of the situations or facts with regard to which the dispute arises It is on this limitation that the French Governmtnt relies when it contends that the situations and facts giving rise to the present dispute were prior to the date of its acceptance of the compulsory jurisdiction-the date hereinafter referred to as the crucial datew-and that in consequence the Application of the Italian Government cannot be entertained This view is contested by the Italian Government which maintains that the dispute arises from factors subsequent to France's acceptance of the compulsory jurisdiction first because certain acts which considered separately are in themselves unlawful international acts were actually accomplished after the crucial date secondly because these acts taken in conjunction with earlier acts to which they are closely linked constitute a s a whole a single continuing and progressive illegal act which was not fully accomplished until after the crucial date and lastly because certain acts which were carried out prior to the crucial date nevertheless gave rise to a permanent situation inconsistent with international law which has continued to exist after the said date In presence of these contentions the Court has to interpret the terms -of the French Government's declaration on which the preliminary objection is founded and to consider whether having regard to their dates the situations or facts relied upon by the Italian Government as constituting the subject of the dispute and engaging the international responsibility of France are excluded by the limitation which the French Government inserted in its acceptance of the compulsory jurisdiction The declaration of which the ratification was deposited by the French Government on April 25th 1931 is a unilateral act by which that Government accepted the Court's compulsory jurisdiction This jurisdiction only exists within the limits within which it has been accepted In this case the terms on which the objection ratione temporis submitted by the French Government is founded are perfectly clear the only situations or facts falling under the compulsory jurisdiction are those which are subsequent to the ratification and with regard to which the dispute arose that is to Say those which must be considered as being the source of the dispute In these circumstances there is no occasion to resort to a restrictive interpretation that in case of doubt might be advisable in regard A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC 24 prétation ne saurait en aucun cas dépasser l'expression de l a volonté des Etats qui l'ont souscrite Si les termes qui expriment la limitation ratione temporis sont clairs l'intention qui les a dictés n'en apparaît pas moins bien établie en la formulant on a entendu enlever à l'acceptation de la juridiction obligatoire tout effet rétroactif soit pour éviter de façon générale de réveiller des griefs anciens soit pour exclure la possibilité de voir déférés par requête à la Cour deç situations ou des faits qui remontent à une époque où 1'Etat mis en cause ne serait pas à même de prévoir le recours dont pourraient être l'objet ces faits et situations La déclaration française parle de situations ou de faits La Cour estime que l'emploi de ces deux termes correspond à la volonté de 1'Etat signataire d'embrasser dans une expression aussi compréhensive que possible tous les éléments susceptibles de donner naissance à un différend Elle observe d'autre part que les deux termes « situations » et « faits » étant placés sur la même ligne la limitation ratione temporis leur est commune et que de l'emploi de l'un ou de l'autre ne saurait résulter une extension de la juridiction obligatoire Les situations et les faits qui sont l'objet de la limitation ratione temporis doivent être envisagés au double point de vue de leur date par rapport à la ratification et de leur relation avec la naissance du différend Des situations ou des faits postérieurs à la ratification ne déterminent la juridiction obligatoire que si c'est à leur sujet que s'est élevé le différend La tâche essentielle de la Cour est de vérifier ces conditions dont dépend le bien ou le mal-fondé de l'exception présentée par le Gouvernement français L'antériorité ou la postériorité d'une situation ou d'un fait par rapport à une certaine date est une question d'espèce tout comme constitue une question d'espèce le point de savoir quels sont les situations ou les faits au sujet desquels s'est élevé le différend Pour résoudre ces questions il fauf toutefois garder toujours présente à l'esprit la volonté de 1'Etat qui n'ayant accepté la juridiction obligatoire que dans certaines limites n'a entendu y soumettre que les seuls différends qui sont réellement nés de situations ou de faits postérieurs à son acceptation On ne saurait reconnaître une telle relation entre un différend et des éléments postérieurs qui supposent l'existence ou qui ne comportent que la confirmation ou le simple développement de situations ou de faits antérieurs alors que ceux-ci constituent les véritables éléments gbérateurs du différend C'est en tenant compte de ces considérations que la Cour doit rechercher à présent si le différend qui forme l'objet de la 18 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 24 to a clause which must on no account be interpreted in such a f way as to exceed the intention of the States that subscribed to it Not only are the terms expressing the limitation ratione temporis clear but the intention which inspired it seems equally clear ' i t was inserted with the object of depriving the acceptance of the compulsory jurisdiction of any retroactive effects in order both to avoid in general a revival of old disputes and to preclude the possibility of the submission to the Court by means of an application of situations or facts dating from a period when the State whose action was impugned was not in a position to foresee the legal proceedings to which these facts and situations might give rise The French declaration mentions situations or facts The Court is of opinion that the use of these two terms shows the intention of the signatory State to embrace in the most cornprehensive expression possible al1 the different factors capable of giving rise to a dispute The Court also observes that the two terms situations and facts are placed in conjunction with one another so that the limitation ratione temporis is common to them both and that the employment of one term or of the other could not have the effect of extending the cornpulsory jurisdiction The situations and the facts which form the subject of the limitation ratione temporis have to be considered from the point of view both of their date in relation t o the date of ratification and of their connection with the birth of the dispute Situations or facts subsequent to the ratification could serve to found the Court's compulsory jurisdiction only if it was with regard to them that the dispute arose The principal duty of the Court is to examine the conditions which determine whether the objection submitted by the French Government is well-founded The question whether a given situation or fact is prior or subsequent to a particular date is one to be decided in regard to each specific case just as the question of the situations or facts with regard to which the dispute arose must be decided in regard to each specific case However in answering these questions it is necessary always to bear in mind the will of the State which only accepted the compulsory jurisdiction within specified limits and consequently only intended to submit to that jurisdiction disputes having actually arisen from situations or facts subsequent to its acceptance But it would be impossible to admit the existence of such a relationship between a dispute and subsequent factors which either presume the existence or are merely the confirmation or development of earlier situations or facts constituting the real causes of the dispute I t is with these considerations in mind that the Court has now to consider whether the dispute that forms the subject of 18 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC 25 requête du Gouvernement italien s'est élevé au sujet de situations ou de faits postérieurs à la date critique La détermination précise de cette date a été quelque peu discutée entre les Parties Le Gouvernement français l'a fixée au 7 septembre 1931 date à laquelle sa déclaration subordonnée à la réciprocité est devenue opérante envers YItalie par le dépôt de l'instrument de la ratification de cet Etat tandis que le Gouvernement italien s'est prononcé pour la date du dépôt de l'instrument de la ratification franqaise soit le 25 avril 1931 en faisant valoir que la limitation ratione tem oris ne figure que dans la déclaration de la France La date indiquée par l'un ou par l'autre des Gouvernements ne saurait modifier d'aucune manière les conclusions auxquelles la Cour est arrivée Elle estime donc n'avoir pas à se prononcer sur ce point L'objet du différend a été présenté par le Gouvernement italien sous deux aspects distincts L'aspect général visé sous la conclusion a de la requête concerne ce que ce Gouvernement a désigné sous l'expression accaparement des phosphates marocains D c'est-à-dire un ensemble d'« agissements présenté comme contraire aux obligations internationales du Maroc et de la France dahirs des 27 janvier et 21 août 1920 éviction des ressortissants italiens considérée ici comme un élément ou comme une manifestation de la politique d'accaparement participation de l'Administration marocaine au cartel phosphatier nord-africain Ce dernier grief non mentionné dans la requête n'a été formulé que dans les documents subséquents L'aspect plus limité du différend visé subsidiairement sous la conclusion b de la requête a trait à la décision du 8 janvier 1925 par laquelle le Service des Mines a rejeté la demande de M Tassara et au prétendu déni de justice opposé à lui-même e t à ses successeurs actes également visés sous le vocable général d'« accaparement des phosphates D mais présentés dans cette conclusion b comme contraires à l'obligation internationale de respecter les droits acquis des ressortissants italiens 1 - Ce que le Gouvernement italien désigne sous l'expression accaparement des phosphates marocains a constamment été présenté par lui comme un régime institué par les dahirs de 1920 qui en réservant au Maghzen la recherche et l'exploitation des phosphates ont établi un monopole contraire aux obligations internationales du Maroc et de la France Ce régime étant toujours en vigueur constituerait selon lui une situation postérieure à la date critique elle serait soumise à ce titre à la juridiction obligatoire de la Cour La Cour ne saurait admettre cette manière de voir La situation dénoncée par le Gouvernement italien comme illicite est un 19 A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 25 the Italian Government's Application arose with regard to situations or facts subsequent to the crucial date The precise determination of that date gave rise to some debate between the Parties The French Government placed it on September 7th 1931 the date on which its declaration being subject to reciprocity became operative in regard to Italy as a result of the deposit of the latter's ratification on the other hand the Italian Government declared for the date of the deposit of the French instrument of ratification namely April zgth 1931 contending that the limitation ratione temporis only appeared in the declaration of France The date preferred by one or other of the Governments would not in any way modify the conclusions which the Court has reached I t does not therefore feel called upon to express an opinion on that point The subject of the dispute has been presented by the Italian Government under two separate aspects a general aspect covered by submission a of the Application which is concerned with what that Government describes as the monopolization of the Moroccan phosphates in other words a whole group of measures which are represented as being contrary to the international obligations of Morocco and of France dahirs of January 27th and August z s t 1920 expropriation of the Italian nationals regarded in this case as an element in or expression of the policy of monopolization participation of the Moroccan Administration in the North-African phosphate cartel The latter complaint which does not appear in the Application was put forward only in the subsequent documents The more limited aspect of the dispute which is presented alternatively in submission b of the Application relates to the decision of January 8th 1925 in which the Department of Mines rejected M Tassara's claim and to the alleged denial of justice to him and his successors these measures are also included under the general designation monopolization of phosphates but are put forward in this submission b as contrary to the international obligation to respect the vested rights of the Italian nationals 1 -What the Italian Government refers to as the monopolization of the Moroccan phosphates has been consistently presented by that Government as a régime instituted by the dahirs of 1920 which by reserving to the Maghzen the right to prospect for and to work phosphates have established a monopoly contrary to the international obligations of Morocco and of France I t contends that this régime being still in operation constitutes a situation subsequent to the crucial date and that this situation therefore falls within the Court's compulsory jurisdiction The Court cannot accept this view The situation which the Italian Government denounces as unlawful is a legal position 3 19 26 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC état de droit qui est né de la législation de 1920 Elle ne peut au point de vue de la critique qui en est faite être isolée de la législation dont elle est issue L'incompatibilité prétendue du régime du monopole avec les obligations internationales du Maroc et de la France est un grief qui s'adresse avant tout aux dahirs de 1920 qui l'ont institué Si en l'établissant le Maroc et la France ont violé le régime conventionnel de l'Acte général d'Algésiras du 7 avril 1906 et de la Convention francoallemande du 4 novembre 1911 cette violation procède des dahirs de 1920 C'est dans ces dahirs qu'il faut voir les faits essentiels constitutifs du prétendu accaparement et par conséquent les véritables faits générateurs du différend relatif à cet accaparement Or ces dahirs sont des faits qui par leur date échappent à la juridiction de la Cour Le Gouvernement italien a tenté néanmoins d'attirer le grief d'accaparement sous la juridiction obligatoire de la Cour en présentant l'accaparement comme un fait illicite continué et progressif qui n'aurait trouvé sa perfection que dans certains actes postérieurs à la date critique un déni de justice qui aurait été opposé à M Tassara et à ses successeurs en 1931-1933 et la participation de l'Administration phosphatière marocaine au cartel nord-africain des phosphates en 1933-1934 La Cour exposera plus loin son opinion au sujet du prétendu déni de justice Quant à la participation de l'Administration marocaine des phosphates au cartel phosphatier la Cour a observé déjà qu'il s'agit là d'un élément qui n'a pas été mentionné comme objet du différend dans la requête introductive d'instance indiqué dans le Mémoire du Gouvernement italien à un point de vue surtout historique il a finalement été décrit dans les écritures subséquentes du Gouvernement italien comme le point culminant de la politique d'accaparement Il y a lieu de remarquer que ni la formation du cartel phosphatier ni la participation à ce cartel de l'Administration marocaine des phosphates n'ont été présentées par le Gouvernement italien comme des faits qui formeraient en eux-mêmes et à eux seuls l'objet d'un différend quelconque entre l'Italie et la France La participation au cartel phosphatier est présentée comme faisant partie de l'accaparement des phosphates elle en constituerait le terme final et le couronnement Dans le délit continué et progressif que constitueraient les actes successifs du Gouvernement français elle marquerait le moment où le dessein délictueux qui les a déterminés se serait trouvé pleinement réalisé A ce titre et par sa date elle entraînerait à sa suite tous les agissements de l'Administration chérifienne et du Gouverne- A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 26 resulting from the legislation of 1920 and from the point of view of the criticism directed against it cannot be considered separately from the legislation of which it is the result The alleged inconsistency of the monopoly régime with the international obligations of Morocco and of France is a reproach which applies first and foremost to the dahirs of 1920 establishing the monopoly If by establishing the monopoly Morocco and France violated the treaty régime of the General Act of Algeciras of April7th 1906 and of the Franco-German Convention of November 4th 1911 that violation is the outcome of the dahirs of 1920 In those dahirs are to be sought the essential facts constituting the alleged monopolization and consequently the facts which really gave rise to the dispute regarding this monopolization But these dahirs are facts which by reason of their date fa11 outside the Court's jurisdiction The Italian Government has nevertheless sought to bring the complaint concerning monopolization within the Court's compulsory jurisdiction by presenting it as a continuing and progressive unlawful action which has only been completed by certain acts subsequent to the crucial date a denial of justice alleged to have been suffered by M Tassara and his successors in 1931-1933 and the participation of the Moroccan Phosphates Administration in the North-African phosphates cartel in 1933-1934 The Court will state its opinion regarding the alleged denial of justice later on in this judgment As regards the participation of the Moroccan Phos hatesAdministration in the h o s phates cartel the Court ha already observed that thatLis a point which was not mentioned as a subject of dispute in the Application instituting proceedings which was referred to in the Italian Government's Memorial mainly from a historical point of view-but which was finally described in the Italian Government's later documents as the culminating point of the policy of monopolization I t should be observed that neither the formation of the phosphates cartel nor the participation in this cartel of the Moroccan Phosphates Administration have been presented by the Italian Government as facts which in themselves and alone would constitute ground for any dispute between Italy and France The participation in the cartel is presented as a part of the monopolization of phosphates it is described as the final step and crowning point of that policy In the continuing and progressive violation constituted by the successive actions of the French Government it is said to mark the final accomplishment of the unlawful design underlying these actions I t is alleged that on this ground and by reason of its date it involves al1 the actions of the Shereefian Administration and 27 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC ment franqais depuis 1920 ce qui autoriserait à les déférer dans leur ensemble à la juridiction obligatoire de la Cour La Cour ne peut admettre l'existence du lien que la thèse du Gouvernement italien tend à établir ainsi entre le cartel phosphatier et le prétendu accaparement des phosphates L'objet du différend entre le Gouvernement italien et le Gouvernement français est l'atteinte prétendue portée par le monopole au régime de liberté économique sans aucune inégalité que le Gouvernement italien considère comme imposé par les accords conventionnels en vigueur La participation de l'Administration marocaine au cartel n'a pas eu pour effet de soustraire les phosphates à ce régime EIIe n'a modifié aucunement I'état de choses créé à cet égard depuis 1920 par le monopole qui seul pourrait être mis en discussion à ce propos Le monopole a pu permettre la participation au cartel mais celle-ci n'affecte en rien la légalité ou l'illégalité du monopole II - Envisagé sous son aspect plus limité visé sous la conclusion b de la requête introductive d'instance le différend entre les deux Gouvernements a trait à la prétendue éviction de certains ressortissants italiens éviction qui résulterait de la décision du Service des Mines en date du 8 janvier 1925 et du déni de justice qui l'aurait suivie faits présentés comme incompatibles avec l'obligation internationale incombait au Maroc et à la France de respecter les droits acquis Le Gouvernement italien ne conteste pas que la prétendue éviction de M Tassara est bien l'effet de la décision du Service des Mines de 1925 et c'est pourquoi il en poursuit l'annulation et la réintégration des ayants droit de M Tassara dans la situation dont celui-ci aurait été illégalement privé Par sa date cette décision du Service des Mines échappe à la juridiction de la Cour Le Gouvernement italien a voulu se soustraire à cette conclusion en présentant l'éviction de M Tassara et de ses ayants droit comme ne s'étant réalisée pleinement qu'à une époque postérieure à la date critique Selon lui la décision de 1925 n'aurait constitué qu'une violation encore imparfaite du droit international seuls certains actes postérieurs à la date critique auraient rendu cette violation parfaite par le refus définitif de tout redressement de la situation créée en 1925 et donné naissance au différend entre les deux Gouvernements A cette fin le Gouvernement italien s'est prévalu surtout d'une note du ministère des Affaires étrangères de France à A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 27 of the French Government since 1920 and that this justifies the submission of all these actions to the Court's compulsory jurisdiction The Court cannot admit the existence of the connection which the Italian Government seeks thus to establish between the phosphates cartel and the alleged monopolization of phosphates The subject of the dispute between the Italian Government and the French Government is the alleged infringement resulting from the monopoly of the régime of economic liberty without inequality which the Italian Government holds to have been imposed by the agreements in force The participation of the Moroccan Phosphates Administration in the cartel did not result in withdrawing phosphates from the operation of this régime I t in no way altered the situation which had been established in this respect ever since 1920 by the monopoly which alone could form the subject of complaint in this connection The monopoly may have made the participation in the cartel possible but this participation does not in any way affect the legality or illegality of the monopoly II -Regarded from its more restricted aspect-the aspect envisaged in submission b of the Application instituting proceedings-the dispute between the two Governments relates to the alleged dispossession of certain Italian nationals as the result of the decision of the Mines Department of January 8th 1925 and of the denial of justice alleged to have followed that decision these facts being alleged to be inconsistent with the international obligation incumbent on Morocco and on France to respect vested rights The Italian Government does not deny that the alleged dispossession of M Tassara results from the Mines Department's decision of 1925 and for that reason it seeks to obtain the annulment of that decision and the reinstatement of M Tassara's successors in the rights of which M Tassara is alleged to have been illegally deprived This decision of the Mines Department owing to its date fallç outside the Court's jurisdiction The Italian Government has sought to avert this consequence by arguing that the dispossession of M Tassara and his successors only becarne definitive at a time subsequent to the crucial date That Government contends that the decision of 1925 constituted only an uncompleted violation of international law that this violation only became definitive as a result of certain acts subsequent to the crucial date and of the final refusa1 to remedy in any way the situation created in 1925 and that these acts gave rise to the dispute between the two Governments In arguing thus the Italian Government has relied mainly on a note of the French Ministry for Foreign Affairs to the l'ambassade d'Italie du 28 janvier 1933 et d'une lettre du même jour adressée par ce ministère à M de Gennaro Musti note et lettre dans lesquelles il a voulu voir à la fois une interprétation officielle des prétendus droits acquis des ressortissants italiens contraire aux obligations internationales de la France et une confirmation du déni de justice déjà opposé aux intéressés par le refus de recours gracieux Il est impossible de trouver dans les énonciations contenues dans ces documents un fait nouveau qui aurait donné naissance au différend actuel entre la France et l'Italie Cet échange de vues ne représente qu'une phase de la discussion qui s'était élevée entre les ayants droit de M Tassara et le Gouvernement français discussion dans laquelle jusqu'à la date du 16 juin 1933 le Gouvernement italien s'est borné à prêter ses bons offices De même le refus d'accéder à la demande de soumettre le litige à des juges extraordinaires n'est que le refus de régler ce même litige d'une certaine manière et il n'a pas été prétendu par le Gouvernement italien que ce refus considéré en soi constitue un fait illicite international générateur d'un différend nouveau Dans le prétendu déni de justice allégué par le Gouvernement italien la Cour ne peut pas voir un élément générateur du différend actuel Dans sa requête le Gouvernement italien a présenté la décision du Service des Mines comme un fait illicite international parce que cette décision aurait été inspirée par la volonté d'écarter la mainmise étrangère et qu'elle constituerait de ce chef une violation des droits acquis placés sous la sauvegarde des conventions internationales S'il en était ainsi c'est dans cette décision qu'il faudrait voir la violation déjà parfaite du droit international violation qui engagerait par elle-même et immédiatement la yesponsabilité internationale S'agissant d'un acte imputable à I'Etat et décrit comme contraire aux droits conventionnels d'un autre Etat la responsabilité internationale sTJétablirait directement dans le plan des relations entre ces Etats En pareil cas le prétendu déni de justice constitué soit par une carence de l'organisation judiciaire soit par le refus de recours administratifs ou extraordinaires destinés à y suppléer ne peut que laisser subsister le fait illicite II n'exerce aucune influence ni sur sa consommation ni sur la responsabilité qui en dérive Quant à la thèse selon laquelle 1 ' état de spoliation de M Tassara et de ses ayants droit constituerait une situation illicite permanente qui bien que née de la décision du Service des Mines se serait maintenue à une époque postérieure à la date critique par l'effet du déni de justice opposé aux intéressés la Cour peut se borner à rappeler le principe qu'elle a formulé plus haut le grief de déni de justice ne saurait être séparé de la critique que le Gouvernement italien entend faire de la décision 22 Lt A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 28 Italian Embassy dated January 28th 1933 and a letter of the same date sent by the same Ministry to M de Gennaro Musti it has tried to make out that this note and this letter constitute both an officia1 interpretation of the alleged vested rights of the Italian nationals-an interpretation inconsistent with the international obligations of France-and a confirmation of the denial of justice to those nationals already effected by the refusal of a petition for redress I t is impossible in the statements contained in these documents to find any new fact which could have given rise to the present dispute between Italy and France This exchange of views merely represents a phase in the discussion which had arisen between M Tassara's successors and the French Government in which discussion the Italian Government until June 16th 1933 merely lent its good offices Similarly the refusal to accede to the request to submit the dispute to extraordinary judges is merely a refusal to settle this particular dispute in a certain way and it is not contended by the Italian Government that this refusal in itself constitutes an unlawful international act giving rise to a new dispute The Court cannot regard the denial of justice alleged by the Italian Government as a factor giving rise to the present dispute In its Application the Italian Government has represented the decision of the Department of Mines as an unlawful international act because that decision was inspired by the will to get rid of the foreign holding and because it therefore constituted a violation of the vested rights placed under the protection of the international conventions That being so it is in this decision that we should look for the violation of international law-a definitive act which would by itself directly involve international responsibility This act being attributable to the State and described as contrary to the treaty right of another State international responsibility would be established immediately as between the two States In these circumstances the alleged denial of justice resulting either from a lacuna in the judicial organization or from the refusal of administrative or extraordinary methods of redress designed to supplement its deficiencies merely results in allowing the unlawful act to subsist It exercises no influence either on the accomplishment of the act or on the responsibility ensuing from it As regards the argument that the dispossession of M Tassara and his successors constituted a permanent illegal situation which although brought about by the decision of the Department of Mines was maintained in existence at a period subsequent to the crucial date by the denial of justice to the claimants the Court need only recall the principle which it has set forth above the complaint of a denial of justice cannot be separated from the criticism which the Italian Government 22 zg l 374 - PHOSPHATES DU MAROC du Service des Mines intervenue le 8 janvier 1925 puisque le déni ne saurait être considéré comme établi par la Cour qu'après que celle-ci aurait constaté au préalable la réalité des droits des particuliers qui se seraient vu refuser la protection judiciaire Cette constatation elle' ne pourrait la faire sans mettre en cause la décision du Service des Mines de 1925 11 en résulte que l'examen du bien-fondé de ce grief ne pourrait être entrepris sans étendre la juridiction de la Cour à un fait qui en raison de sa date n'y est pas soumis Ainsi à quelque point de vue que l'on se place c'est toujours la décision du Service des Mines du 8 janvier 1925 qui dans cette question de l'éviction des ressortissants italiens apparaît comme le fait au sujet duquel s'est élevé le différend ' En conclusion la Cour est amenée à constater que le différend qui lui a été soumis par le Gouvernement italien soit qu'on l'envisage sous son aspect général constitué par le prétendu accaparement des phosphates marocains soit qu'on le considère sous l'aspect plus limité que représente la réclamation des ressortissants italiens ne s'est pas élevé au sujet de situations ou de faits postérieurs à la ratification de l'acceptation par la France de la juridiction obligatoire et qu'en conséquence elle n'a pas juridiction pour statuer sur ce différend La Cour étant arrivée à cette conclusion il ne lui appartient pas de statuer sur les autres exceptions présentées par le Gouvernement français La Cour par onze voix contre une décide la requête présentée le 30 mars 1936 par le Gouvernement italien n'est pas recevable Le présent arrêt a été rédigé en français et en anglais le texte français faisant foi A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO 29 directs against the decision of the Department of Mines of January 8th 1925 for the Court could 11ot regard the denial of justice as established unless it had first satisfied itself as to the existence of the rights of the private citizens alleged to have been refused judicial protection But the Court could not reach such a conclusion without calling in question the decision of the Department of Mines of 1925 I t follows that an examination of the justice of this complaint could not be undertaken without extending the Court's jurisdiction to a fact which by reason of its date is not subject thereto Accordingly whatever aspect of the question is considered it is the decision of the Department of Mines of January 8th 1925 which is always found in this matter of the dispossession of the Italian nationals to be the fact with regard to which the dispute arose In conclusion the Court finds that the dispute submitted to it by the Italian Government whether regarded in its general aspect represented by the alleged monopolization of the Moroccan phosphates or in its more limited aspect represented by the claim of the Italian nationals did not arise with regard to situations or facts subsequent to the ratification of the acceptance by France of the compulsory jurisdiction and that in consequence it has no jurisdiction to adjudicate on this dispute The Court having arrived at this conclusion does not feel called upon to adjudicate on the other objections submitted by the French Government FORTHESE REASONS The Court by eleven votes to one decides that the Application filed on March 3oth 1936 by the Italian Government cannot be entertained The present judgment has been drawn up in French and English the French text being authoritative 30 A B 74 - PHOSPHATES DU MAROC Fait au Palais de la Paix à La Haye le quatorze juin mil neuf cent trente-huit en trois exemplaires dont l'un restera déposé aux archives de la Cour et dont les autres seront transmis respectivement au Gouvernement de la République française et au Gouvernement royal d'Italie Le Président de la Cour Signé J G GUERRERO Le Greffier de la Cour Signé J LOPEZ OLIVAN Le jonkheer VAN EYÇINGA déclarant ne pouvoir se rallier à l'arrêt rendu par la Cour et se prévalant du droit que lui confère l'article 57 du Statut joint à l'arrêt l'exposé suivant de son opinion individuelle M CHENG TIEN-HSI tout en se déclarant d'accord sur le dispositif a joint l'exposé de son opinion individuelle sur certains motifs de l'arrêt Paraphé J G G Paraphé J L O A B 74 -PHOSPHATES I N MOROCCO Done at the Peace Palace The Hague this fourteenth day of June one thousand nine hundred and thirty-eight in three copies one of which will be deposited in the archives of the Court and the others will be communicated to the Government of the French Republic and to the Royal Italian Government respective1y Signed J G GUERRERO President Signed J LOPEZOLIVAN Registrar Jonkheer VAN EYSINGAdeclares that he is unable to concur in the judgment given by the Court and availing himself of the right conferred upon him by Article 57 of the Statute has appended to the judgment the separate opinion which follows M CHENGTIEN-HSI while in agreement with the operative clause of the judgment has appended a separate opinion regarding some of the grounds on which the judgment is based Initialled J G G Initialled J L O
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